Franchise ou commerce associé : quelle forme vous convient ?

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Le mot est devenu commun, pire, fourre-tout. Or la franchise n’est qu’une forme de contrat parmi bien d’autres statuts, la concession, la licence de marque, la coopérative, le partenariat, la commission-affiliation… Futur franchisé/e, séance de révision.

Partons sur des repères clairs : l’entrepreneur qui souhaite développer son concept en réseau a le choix entre deux grandes familles de commerce indépendant organisé, la franchise et ses déclinaisons ainsi que le commerce coopératif et associé. La fédération majeure qui ne conserve dans son appellation que le mot-valise franchise, la FFF, insiste sur ce risque de quiproquo et rappelle la spécificité des formes multiples du commerce organisé.
À l’inverse, la FCA – Fédération du commerce coopératif et associé – se démarque bien du statut de franchise pure.

Avec désormais 2 004 réseaux recensés en 2018, la France est devenue championne d’Europe de la franchise. Mais au sens restreint. En 2018, ces 2 004 réseaux ne représentaient en termes de chiffre d’affaires que 25 % des ventes du commerce indépendant organisé. Les 75 autres pourcents sont dégagés par d’autres formes de commerces organisés : la commission-affiliation, la concession et la licence de marque, le partenariat et enfin le, plus important, le commerce coopératif et associé.

1 – La franchise

La forme de la franchise est apparue en France dans les années 1970. Elle autorise la création d’une entreprise en utilisant le concept d’une autre, en échange d’une redevance annuelle. L’entrepreneur franchisé va s’appuyer sur une marque qui a fait ses preuves et profiter des conseils et des services du franchiseur pour la gestion quotidienne. Autre avantage de taille pour un futur entrepreneur : créer son entreprise via une franchise rassure les banquiers, plus enclins à accorder des prêts. Le modèle économique en soi est simple. Il s’agit d’un mode de collaboration entre deux entreprises indépendantes juridiquement et financièrement – le franchisé et le franchiseur. Le franchisé rémunère le franchiseur sous la forme d’une somme initiale (le droit d’entrée) et d’une somme récurrente (la redevance, en général mensuelle), pour l’utilisation de sa marque, de son savoir-faire et de son assistance. Juridiquement, le franchisé signe un contrat de franchise avec le franchiseur dans lequel il s’engage à respecter les conditions d’utilisation de la marque et du savoir-faire. De son côté, le franchiseur est contraint à autoriser le franchisé à exploiter sa marque et son savoir-faire dans les meilleures conditions. Ce modèle a fait ses preuves. Il a permis au plus grand nombre (76 % des franchisés sont des salariés en reconversion) d’accéder à l’entrepreneuriat. Pincipal avantage du modèle : le franchisé bénéficie du soutien actif du franchiseur à toutes les étapes de son développement (formation initiale, formation continue, animation du réseau, assistance…). La transmission du concept dans sa globalité inclut un savoir-faire éprouvé. Le candidat bénéficie en outre et immédiatement de la notoriété de la marque. En revanche, la dépendance du franchisé à l’égard du franchiseur est totale et sa liberté s’en trouve donc réduite. « Ce modèle correspond aux gens qui ne veulent pas se poser de questions et préfèrent suivre scrupuleusement les ordres du franchiseur, sans perdre de temps », formule Michel Kahn, consultant expert en franchise et partenariat, président de l’Iref, la Fédération des réseaux européens de partenariat et de franchise, auteur de l’une des sommes de référence, Franchise et Partenariat (7e édition, Dunod). Le contrat de franchise implique un management vertical et de type hiérarchique : « franchiseur-franchisé » et souvent… « dominant-dominé », précise le consultant.

Le modèle « franchise » au sens restreint correspond aux gens qui ne veulent pas se poser de questions et préfèrent suivre scrupuleusement les ordres du franchiseur, sans perdre de temps

Réussite plus que probable

Ce modèle économique a en tout cas confirmé à nouveau sa solidité en 2018. Il affiche des indicateurs à la hausse (+ 1,4 %), 75 193 points de vente en franchise (+ 1,5 %) et un chiffre d’affaires de 62 milliards d’euros (+ 4,1 %).

Première dérivée : La commission-affiliation
Ce type de contrat, courant dans le prêt-à-porter, reste très proche de celui de la franchise. Le franchisé bénéficie, moyennant un droit d’entrée et une redevance annuelle, de l’exclusivité territoriale, de l’assistance et du transfert de savoir-faire. En revanche, contrairement à la franchise, le stock appartient à la tête de réseau qui le finance et qui le reprend en fin de collection. Dans ce contexte, l’affilié ne prend pas de risques financiers mais dépend des choix du réseau qui lui impose ce qu’il doit vendre. Outre le prêt-à-porter, le modèle se montre courant dans les secteurs à forte rotation de produits.

Deuxième dérivée : La concession et la licence de marque
Ces deux modèles offrent davantage d’autonomie au candidat concessionnaire. La relation partenariale se limite à la vente de produits sous le nom de l’enseigne. Dans ce modèle, principalement utilisé dans la distribution automobile et dans les enseignes « industrielles », le concessionnaire ne bénéficie pas du transfert de savoir-faire ni d’assistance ou de formation de la part du concédant (en l’occurrence la marque automobile, par exemple). Le point majeur concerne l’attribution d’une zone territoriale. « Les concessionnaires et affiliés sont les seuls à être approvisionnés dans leur zone et disposent d’un monopole de vente », indique Michel Kahn.

Troisième dérivée : Le partenariat
À l’image de la licence de marque, le contrat de partenariat est plus flexible que celui de la franchise. Il unit deux parties, désignées comme « partenaires » aux intérêts communs. Là non plus, la tête de réseau ne s’engage pas sur son savoir-faire. La distinction est de taille, comme l’explique Michel Kahn : « Le contrat de partenariat exonère la tête de réseau des responsabilités et des conséquences qui en découlent. » Un tel modèle comprend la licence de marque, l’assistance technique et la fourniture. Sur le plan économique, les droits d’entrée sont, comme pour la franchise, des redevances initiales correspondant aux services initiaux dispensés. En revanche, ajoute notre expert, « c’est sur le management que le contrat de partenariat se distingue par l’échange d’expérience et de compétences, en favorisant la fertilisation croisée. La tête de réseau communique au partenaire son modèle, ses formules, ses outils, il l’autorise à enrichir les méthodes et l’offre générale, sans risque de dénaturer le concept. L’objectif : se montrer plus performant sur le plan local en s’adaptant au consommateur, s’efforcer de se positionner plus proche de lui et ainsi optimiser ses propres résultats et, par conséquent, ceux de la tête de réseau et des autres partenaires. » Dans le partenariat, le management n’est pas vertical comme dans la franchise, mais horizontal. Il se révèle également participatif par l’implication des partenaires, notamment via la mise en place d’un « conseil consultatif ». Michel Kahn souligne que « cette structure de dialogue favorise la prévention du contentieux par l’arbitrage des éventuels conflits entre la tête de réseau et les partenaires. De quoi garantir la cohésion du réseau ».

Le commerce « coopératif et associé » est une organisation horizontale. L’entrepreneur détient un vrai pouvoir de décision, au même degré que les autres chefs d’entreprise adhérents au réseau

2 – Le commerce coopératif et associé

À côté de la franchise et de ses dérivés, il existe une autre manière de créer son entreprise en réseau : le commerce coopératif et associé. Au total, il pèse 30 % du commerce de détail en France avec, en 2018, un chiffre d’affaires de 156 milliards d’euros réalisé par 49 880 points de vente appartenant à 180 enseignes nationales. On se rend compte du poids de ce commerce associé par rapport à la franchise stricto sensu.

Principe : juridiquement et financièrement indépendant, le point de vente adhère à un groupement (le plus souvent une coopérative, mais aussi un groupement d’intérêt économique – GIE –, une société civile, etc.). Le commerçant est un partenaire ou un associé, propriétaire de son point de vente et d’une part du capital du réseau : décisionnaire dans le fonctionnement et la stratégie de développement du réseau, il dispose d’une voix lors de l’élection du conseil d’administration. L’adhésion au réseau donne accès à des moyens mutualisés et profite des politiques communes : achat (création d’une centrale d’achats), enseigne, opérations commerciales, services. « Contrairement aux franchisés, les sociétaires détiennent un pouvoir décisionnel ainsi qu’un droit de regard et de contrôle sur la gestion du groupement. Ce qui implique également un surcroît de responsabilités. Et pour cause, ils doivent consacrer une part de leur activité à la vie du réseau et à son bon fonctionnement », explique Alexandra Bouthelier, déléguée générale de la Fédération du commerce coopératif et associé (FCA). Chaque sociétaire alloue quelque 30 % de son temps au groupement, ce qui est significatif. Recrutement, formation des nouveaux arrivants, réunions stratégiques… les missions sont nombreuses. Ce modèle correspond à ceux/celles qui souhaitent plus d’autonomie et d’indépendance. « Il s’agit d’une organisation horizontale, insiste Alexandra Bouthelier. L’entrepreneur détient un vrai pouvoir de décision, au même degré que les autres chefs d’entreprise adhérents au réseau, quel que soit le nombre d’unités qu’ils détiennent. Ils sont les seuls et uniques actionnaires et déterminent ensemble la stratégie du réseau et de ses outils. C’est la règle un homme égale une voix. »

Valeur humaine ajoutée

Ce point est fondamental, souligne Christophe Lesmesle, adhérent de Krys. « La tête de réseau n’a pas vocation à s’enrichir mais à nous accompagner dans notre développement. Les adhérents ne sont pas en compétition car l’on veille à la localisation de chaque nouvel emplacement. En contrepartie, nous investissons du temps auprès de la tête de réseau, mais c’est un plaisir. Nous sommes contents de nous retrouver dans un esprit de famille et de partage. » Tiens ! Voilà peut-être le pourquoi profond de la réussite de cette forme de commerce…

Pierre-Jean Lepagnot

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