« La vie est belle à proportion qu’elle est féroce »

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L’onde positive de Thierry Saussez

TOUS LES MATINS DU MONDE

Je trouve d’abord qu’en ces périodes-là il faut se souvenir d’adopter la devise des optimistes lucides, non pas celle des optimistes béats qui pensent que tout s’arrange toujours, mais celle des lucides, « la vie est belle à proportion qu’elle est féroce ». C’est-à-dire qu’au fond, on ne sait ce qu’est le bonheur que lorsqu’on traverse aussi des épreuves et l’on ne sait ce qu’est le succès qu’à partir du moment où l’on a connu aussi des échecs. Cette devise, je la tire du livre de Pascal Quignard dont Alain Cornaud a tiré le film éponyme, Tous les matins du monde, où le regretté Jean-Pierre Marielle prête ces mots à son personnage, Monsieur de Sainte-Colombe. C’est au passage un hommage à un film magnifique, à un très grand acteur, qui nous rappelle que les obstacles sont faits pour être franchis et pour ne jamais désespérer puisqu’après une crise il y a toujours une renaissance. Voyez la situation économique : l’Insee nous dit qu’un tiers de l’économie aura été affecté par la pandémie. Je trouve que ce n’est pas une si mauvaise performance.

MES COUPS DE CŒUR

S’adressent évidemment aux soignant/es, les professionnels de santé qui sont au front, mais aussi aux routiers, aux manutentionnaires, aux facteur/trices, aux caissier/ères, et à tous ceux/celles qui préservent notre santé, le bien capital, celle des plus fragiles avec tous les réseaux de bénévoles partout en France pour faire les courses d’une personne âgée. Il faut remercier tous ces agissants qui prennent des risques, je pense aux caissières de supermarché qui sont aussi des héroïnes à leur façon. Ils/elles préservent le moment de la reprise qui, du reste, sera spectaculaire.
Coup de cœur également à toutes les entreprises, et notamment aux groupes comme Carrefour, L’Oréal, à LVMH qui fabrique du gel ou aux petites comme 1089, citée dans ma chronique de mars, le réinventeur du jean français qui se reconvertit provisoirement à la fabrication de masques.

LA REPRISE SERA SPECTACULAIRE POUR DEUX RAISONS

La première est que les gens auront conservé du pouvoir d’achat car ils auront moins dépensé et la seconde parce que tout le monde voudra s’« éclater ». Je pense ne pas prendre de risque par cette prévision. L’essentiel est que les dégâts économiques ne soient pas trop importants. Il faut donc aussi rendre hommage au gouvernement qui lâche la bride sur les déficits sans d’autre choix et qui met en place des mesures à leur tour spectaculaires de travail à temps partiel et d’aides aux entreprises, sous condition qu’il faudra que ça suive partout, que tous les maires se préparent à sauver leur début de saison, décalé par la force des choses, je pense notamment à toutes les villes touristiques. Que ces élu/es fassent tourner leurs neurones : parkings gratuits, campagnes de promotion, aides aux commerçants, tout une chaîne, de l’État au terrain, quand gérer la sortie de crise limitera les dégâts.

CE PEUPLE EST AINSI FAIT…

… qu’il peut continuer à danser sous la pluie ou à prendre des risques en pensant que le coronavirus nous quittera comme la grippe H1N1. À cette époque, j’étais le patron de la communication du gouvernement, on s’attendait à une catastrophe, on a assisté à une grippette. Ce n’est pas le cas. Quand, avec Roselyne Bachelot, nous avons géré cette crise, nous avions préparé le pire, et heureusement. Si le virus avait cédé la place au H5N1, tout le monde serait tombé sur le gouvernement. Pour une entreprise comme un gouvernement, la gestion de crise doit se montrer permanente, malgré le coût pour les finances publiques, question qu’il faudra se poser.

LA RELECTURE DES GRANDS CLASSIQUES

Je suggère de (re) lire Chateaubriand, ce qui ferait plaisir à mon regretté ami Jean d’Ormesson, son idole. Pour ma part, j’ai relu des pages fondamentales, les mémoires du Général de Gaulle, quand il écrit que « la vie est un combat, le succès coûte l’effort, le salut exige la victoire ». Il pensait à la guerre, mais ne sommes-nous pas en guerre ? Les mémoires de Raymond Aron, homme considérable, un peu oublié, quand les combats qu’il a conduits contre les totalitarismes furent essentiels. Pour aller au summum de la culture et de l’humour, les mémoires d’Edgar Faure, personnage que j’ai connu comme jeune militant gaulliste puis à la Mission du bicentenaire de la Révolution, qui écrit que « c’est un grand tort d’avoir raison tout le temps ».

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